Introduction

« Cela fait depuis les années 1950 que nous nous battons contre les Frères
musulmans et nous luttons toujours contre eux jusqu’à présent », déclarait
Bachar al-Assad au Daily Telegraph il y a maintenant plus d’un an. Quelques
mois après cette déclaration, qui visait à brandir le spectre de l’Islam
politique comme seule alternative au régime baasiste, les dirigeants syriens
entreprenaient de rappeler aux médias occidentaux à quel point les notions
d’islamisme et de radicalisme étaient, pour eux, nécessairement associées.
Un journaliste travaillant pour une chaîne de télévision syrienne possédée
par Sleiman Mahmoud Maarouf, un proche du général Mohammed Nasif
Khayr Bek, lui-même conseiller sécuritaire auprès du président, déposait
alors le nom d’un faux site internet représentant les Frères musulmans
de Syrie qui allaient revendiquer les attentats sanglants de Damas le 23
décembre 2011 1. La manipulation n’aura duré que quelques jours, les
représentants de la confrérie syrienne niant aussitôt les faits et les journaux
qui avaient repris la fausse information publiant, dans leur majorité, une
note clarifiant la situation 2. Mais le mal était fait : en peu de temps, le
régime était parvenu à distiller le souvenir des années 1970 et 1980 au
cours desquelles les Frères musulmans avaient radicalisé leurs tactiques et
en étaient venus à s’allier avec les factions islamistes les plus extrémistes et
violentes opposées au régime de Hafez al-Assad. Quelles leçons les Frères
syriens ont-ils tiré de leur lutte contre le Baas ? Les positions de la confrérie n’ont-elles pas évolué depuis que le massacre de Hama en février 1982, point d’orgue de la contestation islamiste, a décimé ses rangs ?